Le bimoteur

La fin de l’année approche à grands pas, et il est temps de déterminer le projet de l’été. Quel avion construire ? C’est finalement en cours d’analyse de fonction à plusieurs variables que l’idée tombe : mettre en commun notre matériel de modélisme avec Clément L.

Nous avons la chance d’avoir un matériel sensiblement identique : mêmes moteurs et mêmes régulateurs. La tâche ne devrait pas être trop dure. C’est sur une proposition de Clément que nous avons choisi de réaliser le Douglas A26 Invader, un bombardier bimoteur de l’époque des Mustang P51.

Douglas A26 Invader.

Le défi que nous nous sommes fixé est de faire le plus gros, le plus grand avion possible en construction 100 % dépron, sans réinvestir dans une motorisation. Les expériences fastidieuses de Clément ont permis de déterminer que chaque moteur est capable de tirer verticalement (tel un hélicoptère) 330 g, soit un total de 660 g. L’avion vole, quant à lui, à l’horizontale, et sa masse ne devra donc pas dépasser 1 kg. Deux ou trois calculs plus loin, on a conclu que l’avion fera 1,50 m d’envergure, et que la longueur du fuselage sera de 1,10 m. On parle d’une charge alaire de +40 g/dm². C’est la première fois pour nous qu’un avion sera aussi « lourd ».

Note : rien de démesuré, puisque les plus gros modèles ont souvent une charge alaire de l’ordre de 90 g/dm².

On se rend à Couthuin pour chercher une seconde lipo et des hélices contrarotatives : on a enfin tous les éléments en ne déboursant qu’une vingtaine d’euros.

On débute le chantier avant l’examen de philosophie, histoire de décompresser un peu. Je serai responsable du fuselage, et Clément s’occupera des ailes ainsi que de la motorisation.

Fuselage en dépron de 5 mm.

On innove une drôle de technique : coupe longitudinale du fuselage et de la dérive en un panneau et demi de dépron de 5 mm. Renforcé sur l’arrière par 2 panneaux, cela permettra de poncer le profil de la dérive dans la masse. On colle à cette coupe des demi-couples fidèles aux plans d’origine de l’avion. On innove également un système de charnière solide entièrement au papier collant : il fonctionne parfaitement.

Les demi-ailes sont faites en pliant le dépron, une technique spécialement acquise par Clément. La jointure entre les ailes sera faite avec un triangle de jonc carbone, ainsi la rigidité sera assurée. Les misères commencent avec des difficultés sur le calage du stab horizontal avec son didère et des coups de cutter mal placés. On recommence quelques pièces : l’objet doit être parfait. Clément s’arrache les cheveux à essayer d’imiter la forme ce qu’on appellera « les réacteurs », les supports aérodynamiques des moteurs sur l’aile. Leur forme à la fois cylindrique et conique n’est pas évidente à imiter. Après plusieurs essais, Clément optera pour un entoilage au papier recouvert d’une colle à bois un peu spéciale. Pendant ce temps, je m’acharne à entoiler l’arrière du fuselage au dépron de 3 mm (blanc). Pas évident, mais le rendu est esthétique et l’avion paraît solide.

Entoilage au dépron de 3 mm.

Constatez comme la dérive semble énorme ! Un nez a été taillé dans la masse dans 2 morceaux d’isolant collés ensemble ; l’intérieur est ensuite évidé à chaud pour alléger.

On a dû s’y prendre à plusieurs reprises pour faire le meilleur calage du stab vertical / horizontal avec les ailes ; le résultat semble concluant avec l’apparition du second « réacteur » et du train d’atterrissage avant. Ce dernier a été simplement fait avec une corde à piano, une roue en mousse de 60 mm et un élastique fixé sur une planche de contre-plaqué de 4 mm en guise d’amortisseur.

Avancée de la construction.

S’ensuivent toutes les petites manipulations : renforcement des saumons et du bord d’attaque pour Clément, ainsi que l’installation des ailerons. Pendant ce temps je continue l’entoilage central : 3 pièces ! Pas facile de travailler à deux sur le même modèle, mais l’ambiance déjantée est de la partie. On assemble toute l’électronique ; difficile avec les rallonges des servos : on avait prévu un peu court pour les régulateurs… Tout se termine bien ; l’avion a fameuse allure et il est rigide comme inespéré ! Les premiers tests de roulage au sol nous rassurent : il est certain qu’il volera.

En finition.

On réfléchit déjà au centrage ; les batteries devront clairement être le plus possible à l’avant. Il est temps pour moi de partir 18 jours en vacances. Pendant mon absence, Clément peaufine les réglages des différents débattements. À mon retour on travaille le centrage, les batteries sont tout devant, et on rajoutera encore quelques grammes de plomb dans le nez pour que l’avion soit parfait. Le bousin pèse 1,100 kg. Bien que ce chiffre soit élevé, il ne nous inquiète pas à outre mesure.

Malgré la météo belge pourrie, une bruine et un faible vent, on crève d’envie d’aller faire voler l’avion. Encore quelques réglages, notamment au niveau du train avant, et on se lance. Clément aux commandes, avion en piste, le stress monte ! Le pilote nous tient l’avion à folle vitesse en ligne droite, et celui-ci s’élève d’emblée vers le ciel : c’est déjà une réussite ! Les conditions climatiques ne jouent pas en notre faveur, mais le premier vol est plutôt long, Clément ramène la machine sur un petit « ras’motte ». On se rend compte que la profondeur nous a lâché et qu’elle oscille énormément ! Clément tente de la récupérer, mais elle va se crasher dans les hauts blés. L’avion s’est découpé presque proprement en 3 parties : pas catastrophique. Quelle dose de plaisir pour un premier vol ! Les pistolets à colle chauffent à peine qu’on est bouillants de repartir voler ! Je ne rappellerai jamais assez à Clément l’importance des vis qui tiennent les gouvernes ! On répare le tout en moins d’une heure et on improvise une banderole publicitaire à l’effigie de notre groupe du premier quadri à l’EPL : « 11.45 ».

Le bimoteur et la banderole publicitaire .

Les deux autres vols, malgré les mauvaises conditions climatiques, sont merveilleux. Bien que l’engin ne semble pas facile à piloter, Clément commence à l’avoir sérieusement en main. Cet avion est l’aboutissement de longues heures de cutter et de pistolet à colle, mais aussi de craintes, de brûlures et d’humour ! Quel plaisir de le voir voler avec prestance et assurance dans le ciel ! On rentre vite avant une averse, le sourire aux lèvres et tellement satisfaits !

Le bimoteur dans sa splendeur.

Ci-dessous la vidéo de notre dernier vol. Jugez par vous-mêmes des qualités de l’avion et des conditions climatiques !

L’avion est remisé jusqu’au mois d’août. D’autres aventures l’attendent, telles que le remorquage d’un planeur !

Que du bonheur avec cet avion ! On est pas près d’oublier l’expérience bimoteur !

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