Conception et fabrication d’un refroidisseur de bière

Et s’il était possible d’avoir un dispositif qui, à l’inverse du micro-onde, permet de refroidir un liquide en quelques secondes ? Après plusieurs prototypes, je me lance dans la fabrication d’une machine complète qui permet de refroidir une bière de 20°C à 5°C en 8 minutes. Le système embarque 8 modules Peltier, 4 alimentations à découpage et un processeur embarqué.

Tout ce projet est résumé en une vidéo disponible sur ma chaîne YouTube :

Les modules Peltiers

Ces petits modules (plaques de 40x40mm) ont une capacité thermoélectrique intéressante. Lorsqu’on les alimente avec un courant assez important (quelques ampères), l’une des faces de la plaque devient chaude tandis que l’autre refroidit. Si on parvient à évacuer la chaleur de la face dite “chaude”, alors la face dite “froide” continue d’absorber de la chaleur et descend en température.

Le rendement de ces modules est particulièrement mauvais et la difficulté consiste à évacuer efficacement la chaleur de la face chaude et de les alimenter correctement.

Comment fonctionne la machine ?

L’idée est de se servir un verre dans un gobelet et disposer celui-ci dans l’orifice. De cette façon, le liquide est en contact avec le “dissipateur” par l’intermédiaire du plastique. A ce dissipateur sont collées 8 faces froides de 8 modules Peltier. La chaleur peut donc être absorbée de la bière vers les modules. Mais où va cette chaleur ? Sur les 8 faces chaudes se trouvent 4 waterblocks (comme on peut trouver en watercooling d’ordinateur) dans lesquels circulent en continu de l’eau. L’eau est puisée dans le bidon de 50L à l’aide de 4 pompes, elle embarque une partie de la chaleur et retombe dans le bidon. Le système est donc fermé. La chaleur est extraite du liquide contenu dans le gobelet et donc sa température diminue.

1. Le dissipateur :

Le moulage de la pièce imprimée 3D est inspiré du moulage des poêles en aluminium en Afrique. On a dû s’y reprendre à 5 fois pour y arriver. On refond des lingots qui ne sont autres que des canettes de CaraPils refondues. Les inclusions d’air sont liées à un mauvais dégazage et à une température trop élevée de l’alu en fusion (il était rouge…). On aurait probablement pu faire mieux. La pièce est usinée à partir d’une barre en aluminium. Olivier a percé au diamètre de 40mm et a tourné le cône en vérifiant que le gobelet collait bien. La pièce est cylindrée, surfacée et puis fraisée pour faire les 4 encoches.

2. La structure :

Le tout pèse dans les 70kg et c’est pourquoi il faut une structure solide. Elle s’assemble en 2 parties (base roulante et couvercle) pour faciliter le montage des composants. C’est super compact. Tout est soudé avec mon petit poste inverter et ensuite retouché à la meuleuse. C’est très long à faire mais ça en vaut la peine. Les roues sont fixées sur une tige filetée M16 (écrou et contre écrou) réduite à 12 sur la portée nécessaire avec un filetage M12 pour l’écrou de compression.

3. L’électronique :

J’ai utilisé EasyEDA, principalement pour essayer. A refaire, je ferais ça sur Kickad. Je manque cruellement d’expérience en placement/routage mais j’ai eu l’occasion de beaucoup apprendre ces derniers temps. Le service de JLCPCB est vraiment top. Cette carte était l’occasion pour moi de tester un nouveau microcontrôleur (STM32F103) et une nouvelle façon de le programmer (loin de la simplicité Arduino). Le code n’est pas fini et de nombreuses fonctionnalités pourraient exister. Le PCB embarque déjà des pistes d’améliorations (second thermomètre, contrôle moteur pour la convection, interface user, etc).

4. Le busbar :

Il y a 3 barres en cuivre, taraudées 7xM5 chacune pour accueillir les cosses des alimentations (phase, neutre et terre). La structure est reliée à la terre. 4 alimentations 40A en 12V, cela donne 1920 Watts consacrés au refroidissement ; d’où le nom.

5. L’assemblage :

Les tôles sont en aluminium.J’imprime le plan et je le colle dessus pour pointer le réseau de trou. Les tôles sont ensuite rivetées et les éléments vissés par boulons ou par assemblage vissé. J’ai utilisé du câble de 2,5mm² pour les alimentations secteurs et des câbles 10 AWG cossés pour les modules Peltiers. Tout rentre au millimètre et c’est tout l’intérêt d’une bonne CAO. La partie hydraulique m’aura demandé du fil à retordre avec de nombreuses fuites. J’utiliserais des pièces qui se vissent avec des joints si c’était à refaire.

6. Les tests :

Les tests ne sont pas concluants. La machine a une limite interne et peine à passer sous les 0°C. Il est difficile de faire plusieurs essais à la suite. En effet, l’eau contenue dans le bidon se réchauffe assez vite et les performances de la machine diminuent. Après 5 refroidissements, la machine est inutilisable et nécessite de changer l’eau ou d’attendre qu’elle se refroidisse. On voit que la convection forcée aide considérablement (mais la bière est plate après) et que la conduction peut encore être améliorée. Il faut environ 8 minutes pour passer un verre d’une température ambiante à 5°C. Je ne saurais pas faire drastiquement mieux et c’est bien dommage.

Pistes d’améliorations

Malheureusement, elles sont peu nombreuses :

  • Diminuer les pertes par effet joule sur le câblage (minime)
  • Améliorer la conduction (un précédent prototype n’utilisait pas de gobelet mais on perd l’aspect pratique)
  • S’approcher de l’hypothèse de source froide infinie en augmentant la capacité du bidon

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